Compétences en situation de travail
Faisons connaissance avec les compétences. Elles sont au centre du marché de l'emploi et de la vie des organisations. L’un des objectifs d’un entretien de recrutement ou de mobilité est d’ailleurs de cerner celles du candidat.
Définition
Contrairement aux habiletés, la compétence est une faculté qui s’apprécie dans un contexte particulier (mais pas trop restrictif car elle doit être transposable d’une organisation à une autre).
Ceci nous amène à la double définition donnée par Guy Le Bortef : être compétent, c'est « être capable d'agir et de réussir avec pertinence dans une situation de travail » et avoir des compétences, c'est « posséder des ressources pour agir avec compétence ».
Illustrons-le par un extrait de Absolument dé-bor-dée ou le paradoxe du fonctionnaire de Zoé Shepard (Albin Michel 2010).
Depuis les quelque six mois que je suis dans le service, j'ai successivement bricolé des rapports bourrés de chiffres et de mots incompréhensibles très sérieux qui n'ont jamais été lus, bidouillé quelques notes, fait semblant d'écouter dans un nombre incalculable de réunions bidon et joué à plusieurs reprises les agences de voyages en organisant l'accueil de délégations étrangères.
Car lorsque de telles délégations débarquent, il faut oublier tout ce qui a été appris durant ses études et retrouver des réflexes simples : où les loger ? Que leur donner à manger ? Où les trimballer ?
Ce passage souligne la double nature des compétences : certaines relèvent d’une technique apprise tandis que d’autres traduisent des habiletés personnelles dans une situation donnée. D'où une différenciation entre les hard skills et les soft skills.
Typologie
Une autre définition des compétences individuelles, certes incomplète, est : savoir, savoir être, savoir faire.
Le savoir, ce sont les connaissances théoriques acquises à l’école et pour certaines lors de la vie professionnelle. Le savoir faire, ce sont les techniques apprises, les connaissances pratiques. Le savoir être professionnel relève de la façon d’agir dans un contexte. Les deux premiers sont représentés par des hard skills, le troisième par les soft skills.
Sur ces dernières, vous pouvez visitez le site suivant :
https://www.jobready.fr/soft-skills
Elles sont présentées en trois familles : les compétences sociales (communication, travail en équipe, gestion des conflits et négociation), les compétences personnelles (leadership, auto-évaluation et adaptabilité) et les compétences méthodologiques (apprentissage, sens de l’analyse, créativité et résolution de problèmes).
Aujourd’hui les recruteurs tendent à ajouter une troisième catégorie, les mad skills. Ce sont des compétences inhabituelles qui n’ont pas de lien direct avec le poste (sport de haut niveau, reconnaissance dans un milieu artistique, parfaite maîtrise d’une nouvelle technologie…). Mais elles laissent deviner une personnalité hors du commun, ce qui peut intéresser l’employeur si elles s’inscrivent dans la culture d’entreprise. Ne pas confondre avec un simple hobby.
Pour rester dans les anglicismes, le reskilling désigne l'élargissement de ses compétences à un nouveau métier, l'upskilling la montée en compétences dans le même métier et le cross-skilling l'acquisition de compétences transversales.
Exemple
Montrons à travers un exemple l’importance du savoir être.
Dans une entreprise, un utilisateur n’arrive pas à faire démarrer son ordinateur. Il appelle la personne en charge du support informatique. Bien sûr, ce dernier doit être techniquement compétent. Et ça tombe bien, il possède les connaissances requises sur le système d’exploitation, le matériel et le réseau. Mais quid de ses soft skills ?
- Il doit être empathique, c’est-à-dire qu’il sait se mettre à la place de notre utilisateur désemparé. Cette faculté lui permet de choisir les mots justes et surtout ne pas le prendre de haut. L’utilisateur ne doit pas non plus se sentir oublié si un petit délai est nécessaire pour trouver d’où vient le problème.
- L’emploi du ton est très important. Il ne s’agit pas que du ton de la voix. Ce peut être celui d’un courriel. Ni trop distant ni trop familier. On peut être très empathique et néanmoins oublier des formules de politesse !
- Autre compétence, il doit se souvenir à qui il parle. Bien sûr, si l’identité de l’utilisateur s’affiche sur son écran, il n’a aucun mérite à l’appeler par son nom mais il peut aussi être un dépanneur interne à l’entreprise qui se déplace dans le bureau du malheureux…
- Enfin, il doit développer la confiance. Pour cela, il peut expliquer ce qu’il fait, estimer le délai nécessaire pour trouver les raisons d'une panne, etc. Si l’utilisateur n’a pas confiance, il ne dira pas tout, soit parce qu’il se braquera soit parce qu’il n’osera pas. Le résultat est que la personne en charge du support risque de ne pas trouver la cause de la panne, ou alors dans un délai trop long, parce qu’il lui manquera des informations.
Il s’agit bien de compétences et non d’habiletés. Par exemple, on peut montrer beaucoup d’empathie envers les enfants et peu envers les adultes, être chaleureux dans un cercle d’amis et distant au travail, etc. Surtout on voit l’importance des soft skills dans cet exemple qui semblait a priori ne faire appel qu’à des compétences techniques.
Conditions pour qu’elles s’expriment
Les compétences individuelles n’existent réellement que si elles sont reconnues (par la hiérarchie, les collègues, les clients...). Elles sont évaluées à partir de critères objectifs mais aussi sur des impressions. Souvent, un supérieur hiérarchique ne peut juger ses collaborateurs que sur quelques-unes car ils ne sont pas confrontés à suffisamment de situations différentes pour les montrer. Nous-mêmes ne savons pas toujours comment nous réagirions si tel évènement se produisait (même si nous savons nous en persuader) !
Mais pour être reconnues, elles doivent d’abord s’exprimer.
En effet, les compétences relèvent du savoir agir mais pour les montrer il faut ajouter deux conditions : le pouvoir agir et le vouloir agir.
Le pouvoir agir est le fait de ne pas être entravé en raison de conditions de travail peu propices. Par exemple, un salarié cherche à montrer sa créativité mais son supérieur hiérarchique, trop frileux pour envisager le moindre changement, refuse toutes ses propositions.
Le vouloir agir est la motivation. Si un salarié a fait preuve de nombreuses compétences mais qu’il est finalement moins récompensé que ses collègues, il peut juger la situation injuste et se dire « à quoi bon ? »
Compétences collectives
Au-delà des compétences individuelles, on reconnaît aussi l’existence de compétences collectives produites par des dynamiques de groupe. À titre d’exemple, une équipe de foot dans laquelle aucune star n’évolue peut très bien gagner un match contre une équipe plus prestigieuse, du moment que son jeu collectif est supérieur.
L’ensemble des compétences mobilisables au niveau collectif constitue un capital immatériel. Au-delà de celles qui sont requises pour maintenir son activité, l’entreprise peut aussi bénéficier de compétences plus rares, dites distinctives, qui procurent un avantage concurrentiel.
Ce capital doit être géré. En d’autres termes, l’entreprise doit non seulement mobiliser les compétences nécessaires à l’atteinte de ses objectifs, mais aussi anticiper celles dont elle aura besoin au cours des années à venir, compte tenu de l’évolution prévisible des technologies, du marché, de la concurrence, etc. Cette activité a pour nom la gestion prévisionnelle des compétences. Elle s’exerce aux deux niveaux, individuel et collectif.
Voir aussi le diagnostic stratégique interne.