Suites de matrices colonnes
Vous avez été initié aux matrices et vous connaissez le principe des suites numériques. Parfait. Il vous reste à synthétiser ces deux notions pour obtenir un outil particulièrement efficace de mathématiques appliquées.
Le niveau de cette page est celui de la terminale générale, maths expertes.
Sur toute cette page, \(n\) est un entier naturel.
Présentation
Une suite de matrices colonnes est une suite de matrices dont les coefficients peuvent être exprimés sous forme de suites. Si par exemple on définit une suite \((U_n)\) par \({U_n} = \left( {\begin{array}{*{20}{c}} {2n - 3}\\ {{n^2}} \end{array}} \right)\), on peut considérer une suite numérique \((u_n)\) telle que \(u_n = 2n - 3\) et une suite numérique \((v_n)\) telle que \(v_n = n^2.\)
Des suites peuvent aussi être couplées (voir la page sur les graphes probabilistes et état stable).
Suites géométriques
Vous avez appris en classe de première qu’une suite géométrique \((u_n)\) se définit par une relation de récurrence de type \(u_{n+1} = qu_n\) (\(q\) étant la raison), les termes de la suite étant des réels.
Soit une suite géométrique de matrices colonnes de \(m\) lignes. Ainsi \(U_{n+1} = AU_n.\)
\(A\) est une matrice carrée d’ordre \(m\) (sinon la multiplication de matrices est impossible). On l'appelle matrice de transition.
De même on peut appliquer la formule explicite : \(U_n = A^nU_0.\)
Soit par exemple \({U_0} = \left( {\begin{array}{*{20}{c}} 2\\ 3 \end{array}} \right)\) et \(A = \left( {\begin{array}{*{20}{c}} 2&0\\ 0&5 \end{array}} \right)\) avec \(U_{n+1} = AU_n.\)
Grâce au raisonnement par récurrence, nous pouvons exprimer \(U_n\) en fonction de \(n.\)
Initialisation : \(U_0 = A^0U_0\) puisque \(A^0 = I\) (matrice identité).
Hérédité : supposons que \(U_n = A^nU_0.\)
Alors \(U_{n+1} = AU_n\) \(= AA^nU_0 = A^{n+1}U_0.\)
\(A\) étant une matrice diagonale, \({A^n} = \left( {\begin{array}{*{20}{c}} {{2^n}}&0\\ 0&{{5^n}} \end{array}} \right)\)
Donc \(U_n\) \( = \left( {\begin{array}{*{20}{c}} {{2^n}}&0\\ 0&{{5^n}} \end{array}} \right)\left( {\begin{array}{*{20}{c}} 2\\ 3 \end{array}} \right)\) \( = \left( {\begin{array}{*{20}{c}} {{2^{n + 1}}}\\ {3 \times {5^n}} \end{array}} \right)\)
Cette suite est divergente. À l’infini, ses coefficients sont infinis.
Suites arithmético-géométriques convergentes
Rappel sur l’étude des suites arithmético-géométriques convergentes : il s’agit de suites de type \(u_{n+1} = au_n + b.\) On considère un réel \(c\) dont on suppose qu’il s’agit de la limite. On pose alors la suite \((v_n)\) telle que \(v_n = u_n – c.\) On montre ensuite que \((v_n)\) est une suite géométrique. Si \((u_n)\) est bien convergente, la limite de la suite \((v_n)\) est zéro. Vous pouvez vous rendre en page d’exemple de suite arithmético-géométrique si vous souhaitez une illustration de la technique.
Et avec les matrices ? L’expression est de type \(U_{n+1} = AU_n + B.\)
Comme \(U_n\), \(B\) est une matrice colonne de \(m\) lignes.
Une suite de matrices colonnes \((U_n)\) est convergente si toutes les suites qui sont les coefficients de \((U_n)\) ont des limites finies.
Ainsi, si la suite \((U_n)\) définie par \(U_{n+1} = AU_n + B\) est convergente, sa limite \(U\) peut s’écrire \(U = AU + B.\) La matrice \(U\) modélise un état stable.
Là aussi, nous allons exprimer \(U_n\) en fonction de \(n.\)
\(U_n = A^n(U_0-U)+U\)
Démonstration
Par définition, \(U_{n+1} = AU_n + B.\) De plus, nous avons vu qu’il existe une matrice \(U\) telle que \(U = AU + B.\)
Soustrayons membre à membre ces deux égalités pour obtenir la suivante : \(U_{n+1} - U\) \(= A(U_n - U).\) On utilise alors une matrice de suites auxiliaire, comme on le fait avec les suites numériques.
Soit \(V_n = U_n - U\)
\(\Leftrightarrow V_{n+1} = U_{n+1} - U\)
\( \Leftrightarrow {V_{n + 1}} = A({U_n} - U)\)
\( \Leftrightarrow {V_{n + 1}} = AV_n\) (\(V_n\) est donc une suite géométrique de matrices)
\( \Leftrightarrow V_n = A^nV_0\)
Or \(U_n = V_n + U.\)
Donc \(U_n = A^nV_0 + U\)
\(\Leftrightarrow U_n = A^n(U_0-U)+U\)
Marche aléatoire
Soit une variable aléatoire \(X.\) À une période \(n\), elle peut prendre un certain nombre de modalités appelées états (par exemple client ou non-client, rouge vert ou bleu, etc.). Entre \(n\) et \(n+1\), chaque état a une probabilité, toujours la même, de passer à tel autre état (ou de ne pas changer). Les passages successifs forment une suite d’états qui sont les termes d’une suite \((X_n).\) Une présentation et un exercice simple figurent sur la page consacrée aux graphes probabilistes qui vous amène aux chaînes de Markov. Dans un autre registre, le modèle proie-prédateur est un type de processus évolutif modélisable par une suite de matrices colonnes.