Le droit préférentiel de souscription

Mécanisme du DPS

Il existe plusieurs possibilités pour une société d’accroître son capital (voir l'augmentation de capital). L’une d’elles est l’augmentation en numéraire. Les fonds n’ont pas été générés par l’entreprise elle-même mais ils sont apportés soit par les anciens actionnaires, soit par de nouveaux.

souscription

 

Problématique

Cependant, une société n’est pas une entité dont il suffit d’acheter une partie pour se prévaloir de droits. Elle appartient déjà à quelqu’un, en l’occurrence ses anciens actionnaires ! Si l’un d’eux vend ses actions, il reçoit de l’argent en retour. Normal. Mais si de nouvelles parts sont créées, aucun flux financier ne vient dans ses poches.

Du coup, les anciens actionnaires peuvent être lésés par la dilution de leur capital (leur pourcentage de parts est inférieur), d’une part en raison d’une diminution de leur pouvoir de décision et d’autre part à cause d’une proportion inférieure du bénéfice qui leur revient chaque année. Et peine supplémentaire si  les actions de la société sont cotées en bourse puisque les nouvelles émissions sont proposées à un prix bien inférieur au cours (sorte de matelas de sécurité pour que, en cas de baisse du marché, les éventuelles banques garantes ne se retrouvent pas avec quantité d’actions invendables sur les bras).

Par conséquent, les anciens actionnaires doivent recevoir une contrepartie. C’est le droit préférentiel de souscription (DPS) aux actions nouvelles (ne pas confondre avec le bon de souscription). Il s’agit d’une possibilité pour eux de souscrire aux nouveaux titres au prorata de ce qu’ils possédaient auparavant. Comme ce droit est cessible et négociable, il permet aussi aux nouveaux investisseurs d’entrer au capital. Bien sûr, il a une valeur monétaire. Laquelle ?

C’est la différence entre la valeur mathématique (ou boursière) avant et après l’augmentation du capital.

 

Formulation

Soit \(p\) la valeur mathématique ou le cours d’une action avant l’augmentation de capital et \(p’\) la valeur d’émission d’une nouvelle action. Soit \(n\) le nombre d’actions anciennes et \(n’\) le nombre d’actions nouvelles. Le DPS est :

\(\rm{DPS}\) \(=\) \(p - \frac{(n \times p) + (n' \times p')}{n + n'}\) \(=\) \((p - p')\left(\frac{n'}{n + n'}\right)\)

 

Exemple

Le capital d’une société est composé de 100 000 actions dont la valeur mathématique unitaire s’établit à 20 €.

Cette société procède à une augmentation de capital avec maintien du DPS : 25 000 actions nouvelles au prix de 15 €.

À combien s’établit de DPS ?

Utilisons la formule : \(\rm{DPS}\) \(=\) \((20 - 15)\left(\frac{25\,000}{125\,000}\right)\) \(=\) \(1\;€\)

Autre façon d’appréhender le mécanisme :

La valeur d’une action ancienne minorée d’un DPS (c’est-à-dire ce dont dispose un ancien actionnaire vendeur) doit être équivalente à celle d’une action nouvelle majorée de 4 DPS.

Donc \(20 - \rm{DPS} = 15 + (4 × \rm{DPS})\)

\(20 - 15 = 5\; \rm{DPS}\)

\(\rm{DPS} = 1\)

Une troisième façon de présenter les choses :

Supposons que la société est cotée. Avant l’augmentation, la capitalisation boursière était de 2 000 000 €.

Après l’augmentation, cette capitalisation est majorée de \(25\,000 × 15\) \(=\) \(375\,000\;€,\) soit un total de 2 375 000 €. Le cours théorique de l’action s’établit donc à \(\frac{2\,375\,000}{125\,000} = 19\;€.\) Elle a perdu un euro par rapport à son cours précédent de 20 €. Cette perte est compensée par le DPS.

D’où le choix suivant pour l’actionnaire :

Dans cet exemple, il faut détenir quatre actions pour en recevoir une cinquième.

Un ancien actionnaire qui justement détient quatre actions possède ainsi un (petit) portefeuille de 80 €.

S’il souhaite souscrire à une nouvelle action, il ne vend pas son droit (il n’en achète pas non plus) et son pactole s’élève désormais à \(80 + 15 = 95\;€\) moyennant une dépense de 15 €, ou si l’on préfère de \(5 × 19 = 95\;€\) puisqu’après augmentation, on a vu que l’action ne vaut plus que 19 €.

S’il vend ses quatre droits, il ne dispose plus que de \(4 × 19 = 76\;€\) en portefeuille plus 4 € de liquidité que lui a rapportés sa vente de DPS. Il a donc toujours 80 €. Mais comme il n’a pas souhaité dépenser 15 €, le poids de son vote lors des assemblées générales est proportionnellement plus faible qu’avant…

Bien sûr, les DPS permettent aussi de résoudre le problème des rompus lorsqu’un ancien actionnaire ne dispose pas d’un « multiple » (voir la page sur l'augmentation du capital). Dans ce cas, un ancien actionnaire choisit soit de vendre des droits soit d’en acheter. S’il ne fait rien, il perdra la valeur des droits non utilisés à la fin de la période de souscription.

 

Mais encore…

Fiscalement, la vente d’un DPS s’apparente à une plus-value.

Si la société est cotée, les DPS sont également cotés (au comptant) durant la brève période de souscription.

Précisons tout de même qu'une augmentation de capital en numéraire ne donne pas systématiquement lieu à un DPS. Si la société est cotée, le mécanisme est certes fréquent. Il a d’ailleurs la faveur des petits porteurs. Mais l’assemblée générale est souveraine et peut très bien décider de s’en passer, en particulier pour faire entrer un gros investisseur au capital. Et l’on voit parfois à cette occasion des sociétés de second plan (small caps) considérer les petits porteurs comme de braves pigeons ! Éventuellement, les anciens actionnaires privés de DPS ont le droit de souscrire pendant un temps limité aux nouvelles actions à un prix avantageux…

 

DPS