Démarche scientifique et SES
N’en déplaise à certains au point de vue très restrictif, les sciences économiques et sociales (SES) sont bien des sciences. Certes, elles prédisent souvent mal ce qui va se passer, en tout cas moins bien que d’autres disciplines qui prévoient exactement la durée de la chute d’un corps ou la trajectoire d’une comète. Ce n’est pas parce que les SES ne sont pas les sciences mais parce que l’humain est le sujet d’étude le plus difficile qui soit !
Cette page a pour modeste but d’introduire les SES à des élèves de seconde.
Qu’est-ce qu’une science ?
La science est le contraire de l’opinion. C’est un ensemble de disciplines qui s’appuient sur des faits et dont le but est de comprendre le monde. Adopter une démarche scientifique, c’est d’abord faire table rase de ce que l’on croit savoir.
Cette démarche est assez récente dans l'histoire de l'humanité. Elle s'est longtemps heurtée à la religion. Par exemple, il fallut attendre le dix-neuvième siècle pour que Louis Pasteur invalide la théorie de la génération spontanée débattue depuis l’Antiquité.
Une opinion peut être unanimement partagée ou différer d’un individu à l’autre. La théorie selon laquelle le soleil tourne autour de la Terre a été admise par tous avant d’être scientifiquement réfutée. Aujourd’hui, vous pensez peut-être que les jeunes ne lisent plus… alors que le secteur de la littérature jeunesse ne s’est jamais si bien porté ! Les statistiques offrent une bonne base à de nombreuses sciences alors qu'on ne peut émettre qu'une simple opinion sur un ressenti personnel.
Ce qui distingue le fait scientifique, c’est qu’il peut être prouvé et vérifié. En effet, la connaissance repose sur une méthode d’investigation, une théorie, un type de raisonnement et des concepts qui doivent être rigoureusement définis. La démarche scientifique permet d’élaborer des modèles théoriques, parfois mathématiques, qui formalisent une partie de la réalité.
Il existe plusieurs méthodes. Par exemple, la science de l’éducation repose sur des expériences mais l’astronomie s’appuie sur des observations et sur la déduction : nous savons précisément quelles sont les positions des étoiles à une date donnée alors qu’il est impossible de procéder à des expériences dessus !
Une méthode offre un cadre à une ou plusieurs techniques, qui sont des moyens pratiques pour atteindre un but de connaissance. Par exemple, la méthode expérimentale peut utiliser la technique de l’échantillonnage.
Nous ne vous apprendrons rien en ajoutant qu’il existe plusieurs sciences. Mais leurs contours sont flous car il existe des ponts entre certaines d’entre elles. De plus, elles peuvent être décomposées en sous-sciences. Par exemple, la physique peut être découpée en mécanique, optique, acoustique, etc. (notez que cette décomposition est dépassée depuis longtemps mais elle a le mérite d’être claire !). Avec le progrès des connaissances, il est aujourd’hui impossible à un scientifique de maîtriser une discipline dont l’objet est trop large. Il doit se spécialiser.
Nature vs culture
On oppose habituellement trois types de sciences : les sciences exactes (mathématiques), celles de la nature (médecine, chimie…) et celles de la culture. Les sciences de la nature peuvent être décomposées en sciences physiques et sciences de la vie. Les sciences de la culture, encore appelées sciences sociales ou sciences humaines, sont les disciplines qui étudient les phénomènes inhérents aux sociétés humaines et en dégagent des régularités. Les SES regroupent plusieurs d’entre elles mais il en existe beaucoup d’autres (ethnologie, démographie, psychologie, linguistique…).
Les SES
Les SES sont une discipline scolaire qui intègre des notions d’économie, de sociologie et de science politique.
Ces trois disciplines ont ceci en commun d’être explicatives (aspect positif) mais aussi normatives, ce qui signifie qu’un chercheur en économie ou en sociologie laissera transparaître ses opinions dans ses analyses. C’est pourquoi il existe toujours plusieurs écoles pour décrire un même phénomène de plusieurs façons… Concrètement, ceci se traduit dans une démocratie par des partis politiques qui défendent des idées différentes et par des chercheurs qui ne sont pas d’accord entre eux (alors que des physiciens, par exemple, sont tous d’accord sur les lois de la physique !). Par exemple, pour sortir d'une crise économique, certains préconiseront des mesures d'austérité et d'autres l'exacte opposée, c'est-à-dire une relance par la consommation.
Les statistiques fournissent aux scientifiques les données à partir desquelles des modèles sont établis puis vérifiés. Elles proviennent d’enquêtes conduites auprès d’individus ou d’entreprises. Elles permettent d’établir des corrélations (par exemple entre le revenu des parents et la réussite scolaire de leurs enfants).
Deux variables sont corrélées si elles évoluent l’une avec l’autre, soit dans le même sens, soit dans le sens contraire. Mais cela ne signifie pas nécessairement que l’une explique l’autre. Elles peuvent n’avoir aucun lien ou être toutes deux expliquées par une troisième variable cachée. Il existe des techniques statistiques qui permettent d’en avoir le cœur net (elles sont d’ailleurs détaillées sur ce site web).
Exemple : si les ventes de glaces et de ventilateurs sont corrélées, ce n’est pas parce que les unes expliquent les autres mais parce qu’elles sont toutes les deux expliquées par une troisième variable, la température.
Les méthodes qui s’appuient sur des données chiffrées sont dites « quantitatives ». Mais pour bien comprendre un phénomène social, il faut aussi adopter une approche compréhensive, « qualitative », par exemple à base d’entretiens. Certains scientifiques établissent leur théorie sur des données chiffrées et d’autres préfèrent l’approche qualitative mais les deux démarches se complètent plus qu’elles ne s’opposent.
À partir de ce qu’il a observé, le scientifique formule des hypothèses, c’est-à-dire des explications possibles d’un phénomène. Il construit parfois une représentation simplifiée de la réalité appelée modèle. Par exemple, l’équilibre de marché est un modèle. Une fois établi, celui-ci doit être validé par de nouvelles observations, quantitatives ou qualitatives.
Trois sciences complémentaires
L’économiste s’intéresse à la production, à la répartition et à la consommation des richesses. Certains disent que l’économie étudie l’allocation des ressources rares pour satisfaire des besoins.
Le sociologue étudie les faits sociaux. Exemples : la socialisation, le contrôle social, les pratiques culturelles...
Le politiste analyse la façon dont les sociétés sont gouvernées.
Un même phénomène peut être analysé par le prisme de ces trois sciences. Prenons l’exemple des gilets jaunes, mouvement né en France fin 2018. On peut considérer que les éléments générateurs sont économiques (pouvoir d’achat insuffisant), sociologiques (manque de considération) et politiques (mesures et déclarations gouvernementales malvenues). Les conséquences sont elles aussi multiples : économiques (coûts pour l’État et les assurances, manque à gagner pour les commerces, engagements des banques…), sociologiques et politiques (affaiblissement du rôle des syndicats, image détériorée de la police pour une partie de la population…).
Le programme de seconde prévoit un regard croisé sur les relations entre diplôme, emploi et salaire.