Les rendements décroissants

Rendements et économies d'échelle

Les rendements décroissants sont un pilier de la science économique, plus particulièrement de l’école classique puis de l’école néo-classique. Bien que parfaitement logique comme vous le constaterez, ce phénomène ne se vérifie pas systématiquement (tant mieux).

Un exemple simple permettra de le comprendre. Puis nous nous situerons à un niveau plus théorique.

 

Rendement décroissant : exemple

Hector vend du pain au village. Comme il est itinérant, il ne reste qu’une heure dans sa camionnette puis repart. Pendant ce laps de temps, bon nombre de villageois se précipitent pour s’approvisionner. Supposons que 200 pains sont vendus. Le mois suivant Hector reste deux heures au lieu d'une. La file d’attente diminue et le nouvel horaire permet à d’autres clients de s’approvisionner. Mettons qu’Hector vende désormais 230 pains. Supposons que dans un troisième temps il reste huit heures dans ce même village. D’autres acheteurs se manifestent et 350 pains sont vendus.

Que remarquons-nous ? Plus Hector consacre de temps à la vente, plus il écoule de marchandises. Mais s’il rapporte le volume des ventes à son nombre d’heures de présence, il constate une forte diminution. Pour exagérer le raisonnement, supposons qu’il vende encore du pain entre 23 heures et minuit. Sur cette heure-ci, un seul client vient lui acheter une baguette. On est loin des 200 pains à l’heure de la situation initiale ! Vous avez compris qu’au-delà d’une certaine durée, ça ne vaut pas le coup de rester plus longtemps !

 

Les pionniers

Turgot, contrôleur général des finances de Louis XVI, a observé ce phénomène à propos des terres agricoles.

Turgot

Ce pionnier de la science économique a constaté l’extension des terrains destinés à nourrir une population toujours plus nombreuse. Or, les terres nouvellement défrichées réclamaient plus d’efforts que les autres. Par exemple, elles étaient loin de toute source d’irrigation et réclamaient d’importants travaux avant d’être ensemencées.

Ricardo reprit cette analyse en se fondant sur la loi de la population de Malthus selon laquelle les terres nouvellement cultivées pour faire face à l’accroissement de la population sont de moins en moins fertiles. Selon cette logique, le rendement des terrains décroît au fur et à mesure que de nouvelles surfaces s’ajoutent aux zones déjà cultivées.

 

La loi des rendements décroissants

Cette loi s’applique à tous les facteurs de production (travail, capital…).

À court terme, lorsque la quantité d’un moyen de production augmente (les autres restant stables), on assiste à une hausse moins marquée de la production.

Par exemple, ce n’est pas parce qu’un gérant de supermarché double le nombre d’ouvertures de caisses que son chiffre d’affaires va doubler.

C’est sur cette logique que se fondent les plans de licenciements : moins il y a de salariés dans l’entreprise et plus ceux qui restent dégagent de productivité. Mais il y a bien sûr un seuil en-deçà duquel il n’est plus possible de descendre.

Lorsque le rendement d’une entreprise décroît, cela signifie que chaque unité supplémentaire produite coûte un peu plus cher que la précédente. Attention, ceci ne veut pas dire qu’il n’est pas rentable de produire davantage mais que le coût marginal augmente.

On pourrait croire que les rendements décroissants sont la règle. Mais pas du tout. Les rendements sont même très souvent croissants.

 

Les rendements croissants

Si une entreprise recrute quelqu’un, c’est qu’elle espère tirer de son travail des gains supérieurs aux charges supplémentaires qu’elle devra supporter. Idem s’il s’agit d’un investissement matériel. Les rendements sont alors croissants.

Formalisons tout ceci :

\[{\rm{Rendements\;d'échelle}} = \frac{{{\rm{\%\;d'augmentation\;de\;la\;production}}}}{{{\rm{\% \;d'augmentation\;des\;facteurs}}}}\]

S’ils sont égaux à 1, il s’agit de rendements constants, s’ils sont supérieurs à 1 les rendements sont croissants et s’ils sont inférieurs, ils sont décroissants.

Remarquez qu’à ce niveau il n’est pas question de bénéfice ou de perte.

 

Les économies d’échelle

Restons dans une problématique de court terme. L’entreprise supporte certains coûts qui restent fixes, quel que soit le niveau de production. C’est-à-dire que même si son activité est à l’arrêt, l’entreprise doit tout de même les supporter. En revanche elle peut jouer sur des facteurs variables : plus ou moins de travail, par exemple. Intéressons-nous alors au coût de production unitaire moyen, obtenu en divisant le coût total par la quantité produite.

Supposons une manufacture qui produit en petite quantité. Le coût moyen est élevé car chaque unité fabriquée supporte une proportion importante des coûts fixes. Mais plus la production augmente, plus la part des coûts fixes diminue puisqu’ils sont répartis sur une plus grande quantité de produits. Donc, le coût moyen baisse. C’est ce que l’on appelle les économies d’échelle.

usine

Par exemple, un nouveau modèle de voiture supporte des coûts (fixes) liés à la recherche et au développement. Au-delà d’une certaine quantité de voitures vendues, ces frais sont amortis.

Ainsi une diminution du coût unitaire offre un choix stratégique : soit une augmentation des bénéfices, soit une baisse du prix de vente des produits.

Lorsque les rendements sont croissants, il y a économie d’échelle. Mais attention, ces deux notions ne doivent pas être confondues (sinon, vous êtes condamné à relire cette page). Qui plus est, elles ne se recoupent pas puisque les rendements d’échelle sont liés au coût MARGINAL.

À l’inverse, lorsqu’au-delà d’une quantité produite le coût moyen remonte, on parle de « déséconomie d’échelle ».

Couts moyen et marginal

En résumé, il existe en principe un intervalle de production sur lequel la baisse du coût moyen permet des rendements croissants, mais pour une capacité de production donnée il ne faut pas trop produire, ni trop peu. Rappelons aussi que toute l’analyse reste dans le cadre du court terme. Notamment elle ne tient pas compte du progrès technologique.

 

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